Et puis il y a les chasseurs de maillots qui collectionnent le fruit de leur quête avec l’envie de se rapprocher au plus près des émotions passées et de l’histoire de l’Olympique lyonnais. "Mon tout premier maillot, c’est Eric Abidal qui me l’avait donné quand j’étais allé à Tola Vologe. J’y étais allé au culot et il en avait un dans sa voiture. Depuis je suis devenu addict", se souvient Romain, supporter de l’OL "depuis toujours", qui compte 164 maillots, tous portés, dans sa collection.
Car il faut bien faire la différence entre un maillot boutique, celui qu’on trouvera dans n’importe quel magasin de sport, un maillot préparé dont l’intendant s’est occupé mais qui n’a pas été utilisé, et un maillot porté, qui sent encore la transpiration et qui porte les stigmates du match. "Il y a des petites étiquettes avec une codification spécifique pour les maillots portés ou préparés", nous explique Romain. "Au niveau des flocages, il y a des incrustations sur les maillots portés qu’on ne retrouve pas sur les maillots boutique. C’est uniquement réservé aux pros et c’est comme ça qu’on les reconnait".
Alors évidemment, cette différence a un prix : "J’ai un maillot de la finale de la coupe de France porté par Juninho que j’ai acheté 1300 euros. Aujourd’hui, on m’en a proposé plus de 2000 euros. C’est une sorte d’investissement. Ce n’est pas comme l’or, mais presque ! Mais je ne les vends pas", assure le collectionneur.
Car parfois la valeur sentimentale est bien plus forte : "J’ai un maillot de Sonny Anderson, porté face à Monaco, lors de l’année du premier titre. J’avais fait une petite pancarte quand j’étais gamin pour lui demander son maillot et il me l’avait donné. Et j’étais allé le faire signer à Tola Vologe. Celui-là, il est dans un cadre", sourit Romain.
"J’ai un Edmilson de 2001. Mais j’ai des maillots bien plus vieux dans ma collection", note de son côté Mathieu, supporter de l’OL basé en… Bretagne. "Chaque collectionneur a sa priorité. Certains sont prêts à payer très cher le maillot de la saison actuelle alors qu’il perdra de sa valeur dès l’année prochaine. Il y a ceux qui sont à fond dans les éditions spéciales, ceux qui sont prêts à tout mettre sur un maillot avec un flocage Benzema. Moi, je préfère les anciens maillots", confie ce trentenaire, qui possède un exemplaire de 1987, "le plus cher de sa collection". "Avec le temps et l’expérience, on connait à peu près la valeur de chaque maillot. Certains craquent un peu sur des coups de cœur, il faut bien gérer son budget pour ne pas faire n'importe quoi. Il y a parfois des mecs à fond qui dépensent des sommes folles", remarque Mathieu, qui est encore à la recherche d’un maillot 2001 extérieur.
Pour trouver la perle rare, il faut être à l’affût et activer son réseau : "Depuis quelques années, la façon de procéder a beaucoup changé, notamment avec l’arrivée des réseaux sociaux. Cela permet d’augmenter son réseau à l’international, mettre sa collection en ligne, ça ouvre à d’autres collectionneurs et de temps en temps les échanges se font comme ça. Il y a aussi les sites de revente comme Ebay, Vinted et Le bon coin ou encore le site Matchwornshirt", analyse Bruno, heureux propriétaire d’une centaine de maillots portés.
"Le fait qu’ils soient portés est très important, car on touche l’histoire du club, son authenticité, sa culture. Le maillot porté, il a un truc en plus", précise le quadragénaire, spécialisé dans la collection des pièces anciennes, devenues "très difficiles à trouver car il n’y avait qu’un jeu de maillots pour toute la saison". "Mon objectif est d’avoir un maillot porté par saison depuis 1980. Pour moi, les maillots qui ont le plus de valeur, ce sont les maillots des années 90. C’était le foot d’avant, le foot authentique, quand l’OL faisait ses matchs de préparation dans les petits villages et quand on pouvait voir les joueurs sans difficulté. C’était l’époque où il y avait un maillot domicile blanc et un maillot extérieur et pas de maillots aux couleurs un peu loufoques", se remémore Bruno, dont la tunique préférée date de la saison 90-91 : "Un maillot scapulaire blanc, il est assez mythique, déjà parce que le sponsor est particulier, il représente le numéro du département, en termes d’identité locale, c’était fort. Et puis il est blanc, qui est la couleur d’origine de l’OL et enfin, il y a le scapulaire. L’OL dans les années 50 jouait avec un scapulaire… Ce maillot-là est très particulier pour beaucoup de collectionneurs".

Alors certains n’hésitent pas à faire appel à des chasseurs de maillots. C’est la spécialité d’Arthur Point, le gérant du magasin Vintage Historic Sports, situé dans le 2e arrondissement de Lyon : "On fait de la recherche personnalisée pour nos clients. Ça peut être un maillot spécifique, celui d’une année de naissance, le maillot du premier titre, du premier match vécu, du premier joueur apprécié", détaille le commerçant qui s’adresse "aux collectionneurs de maillots car c’est son ADN de base".
Des collectionneurs qui cherchent des pièces plus rares : "Des années 90, les maillots Nike ou même ceux d’avant, quand le club était en 2e division", énumère Arthur Point, dont la boutique compte 2000 références comme des maillots portés de Karim Benzema, de Sidney Govou à Evian ou de Djila Diarra lors du match de l’OL face à Porto.
"Mais Juninho reste le plus demandé, avec Anderson et Benzema", assure le spécialiste, qui remarque "une grosse hype" autour du maillot de football : "Le vintage revient à la mode. Il y a cette nostalgie du foot, le foot d’aujourd’hui a changé et ne plait plus à tout le monde". Et Arthur Point de conclure : "Les clients veulent se rappeler les belles années de leur enfance. Et un maillot, c’est un retour aux premières émotions sportives qui les ont fait vibrer".
F.L.